jeudi 4 décembre 2025

Patriotisme russe

Douze thèses patriotiques russes, mises en ligne en décembre 2024 sur le site du think tank conservateur Izborsky Klub par Vardan Bagdasarian, docteur en histoire, professeur à l'Université de Moscou. Ce texte, repris sporadiquement sur les réseaux sociaux, était affichée ce 2 décembre 2025 dans les locaux de l'université Koubansky à Krasnodar. Ce texte qui ne semble pas avoir rencontré beaucoup d'écho, "rime" bien avec d'autres propos outranciers émanant de canaux officiels, voire avec certains propos de Poutine lui-même...

LE SAVOIR SUPÉRIEUR D'UN PATRIOTE RUSSE

12 thèses

1. Sache que les ennemis de la Russie sont les ennemis de Dieu et de l'humanité, les ennemis de tout ce en quoi tu crois et que tu aimes.

2. Sache que les ennemis de la Russie — satanistes, nazis, pervers, libéraux — veulent détruire l'âme de chacun d'entre nous, nous priver de sentiments et de raison, s'approprier nos terres, asservir l'humanité, établir une dictature de violence et de génocide.

3. Sache que la Russie est invincible, car Dieu est avec elle, elle a pour elle la vérité et une grande histoire de victoires.

4. Sache que la haine des ennemis envers la Russie et son passé découle de leur incapacité à prendre le dessus sur elle, qu'elle constitue le principal obstacle sur leur chemin vers la domination mondiale.

5. Sache que la Russie est invincible, que sa victoire finale est inévitable et que cette victoire ouvrira la voie à l'harmonie et au bonheur pour l'humanité.

6. Sache que la force de la Russie réside dans son esprit et sa volonté, ses valeurs, ses saints et ses héros. Ceux qui ont l'esprit et la volonté sont forts, tandis que la consommation et la débauche engendrent la faiblesse.

7. Sache que son autre force réside dans la fraternité des peuples, leur unité et la compréhension de la Russie comme une patrie commune pour toutes les nationalités russes.

8. Sache que la troisième force de la Russie réside dans le caractère sacré des liens de camaraderie, de collectivisme et de solidarité, et que trahir ses camarades est le crime moral le plus grave.

9. Sache aussi que ta force réside dans ta famille, ton foyer, et que la Russie, en tant que famille de familles, unit ces forces, qu'elle repose sur l'amour, et que l'amour triomphe de la mort.

10. Sache que les ennemis de la Russie sont conscients de sa force et qu'ils cherchent à la saper en agissant sur toi, sur ta conscience, par la tromperie et la corruption.

11. Sache que ton travail et tes sacrifices contribuent à la cause de la Victoire commune.

12. Sache que l'avenir se forge dans la lutte, et que notre lutte est un combat entre le bien et le mal, la vie et la mort. Sois du côté du bien et de la lumière, sois du côté de la Russie, et tu vaincras !

Sources :
https://izborsk-club.ru/26391
NB : j'ai compté une trentaine de résultats Google incluant ce texte, ce qui reste très modeste.

L'auteur présumé est professeur à l'Université d'Etat de Moscou :
https://polit.msu.ru/teachers/bagdasaryan/

mercredi 3 décembre 2025

Au fil des discours de Poutine...

Juillet 2022 : la guerre n'a même pas encore commencé.

« Aujourd'hui, on entend dire qu'ils veulent nous vaincre sur le champ de bataille… Que dire ? Qu'ils essaient. Mais il faut savoir que, dans l'ensemble, nous n'avons encore rien entrepris de sérieux. »

Octobre 2023 : la Russie n'a pas déclenché la guerre.

« J'ai dit à plusieurs reprises que nous n'avons pas déclenché la soi-disant guerre en Ukraine. Au contraire, nous essayons d'y mettre fin. »

Décembre 2025 : ce n'est pas une guerre.

« Avec l'Ukraine, nous adoptons une approche chirurgicale, avec précaution, afin que… enfin, vous comprenez, n'est-ce pas ? Il ne s'agit pas d'une guerre au sens littéral et moderne du terme. »

(Source: Meduza)

samedi 30 août 2025

Le sarcophage de Tabnit

Les inscriptions en phénicien sont rares, il en est très peu resté. Le sarcophage du roi Tabnit de Sidon est donc un trésor linguistique.

https://en.wikipedia.org/wiki/Tabnit_sarcophagus?wprov=sfla1

Le phénicien est extrêmement proche de l'hébreu, pas très éloigné de l'arabe, on y retrouve facilement des racines comme kahane/cohen prêtre, malik / melech roi, Ibn /ben fils...

Quant à son écriture : l'abjad phénicien est l'ancêtre direct de l'alphabet grec, à ceci près qu'il n'y a aucune voyelle. Le 𐤏 représente la consonne 3ain (ע, ع). Le 𐤀 est un 'aleph (أ, א). Le grec a bien sûr recyclé ces deux consonnes gutturales pour en faire les voyelles A et O.

Quelques mots :
𐤊‏𐤄‏𐤍‏ : KHN prêtre 
𐤌‏𐤋‏𐤊‏ : MLK : roi
 𐤁‏𐤍 : BN : fils
𐤊𐤋 𐤀𐤃𐤌 : KL 'DM (kul adom) : tout homme
𐤀‏𐤋‏ 𐤀‏𐤋‏ 𐤕‏𐤐‏𐤕‏𐤇
'al 'al taptaH, n'ouvre pas [mon sarcophage] (double négation insistante)

Quelques lignes :

𐤀‏𐤍‏𐤊‏ 𐤕‏𐤁‏𐤍‏𐤕‏ 𐤊‏𐤄‏𐤍‏ 𐤏‏𐤔‏𐤕‏𐤓‏𐤕‏ 𐤌‏𐤋‏𐤊‏ 𐤑‏𐤃‏𐤍‏𐤌‏ 𐤁‏𐤍
𐤀‏𐤔‏𐤌‏𐤍‏𐤏‏𐤆‏𐤓‏ 𐤊‏𐤇‏𐤍‏ 𐤏‏𐤔‏𐤕‏𐤓‏𐤕‏ 𐤌‏𐤋‏𐤊‏ 𐤑‏𐤃‏𐤍‏𐤌

ʼnk tbnt khn ʻštrt mlk ṣdnm bn
ʼšmnʻzr khn ʻštrt mlk ṣdnm

ʼanôkî Tabnît kôhen ‛Aštart milk Ṣîdônîm bin
ʼEšmûn‛azar kôhén ‛Aštart milk Ṣîdônîm

C'est moi, Tabnit, prêtre d’Astarté, roi de Sidon, fils
d’Echmounadzar, prêtre d’Astarté, roi de Sidon

Ma préférée :

𐤀𐤋 𐤉𐤊𐤍 𐤋𐤊 𐤆𐤓𐤏 𐤁𐤇𐤉𐤌 𐤕𐤇𐤕 𐤔𐤌𐤔

'L YKN LK ZR3 BHYM THT ŠMŠ

’al yakoun laka zar‘ ba-hayyim taHt shamsh

Tu n'auras pas de semence parmi les vivants sous le soleil !



jeudi 24 juillet 2025

Peuple ou pas peuple ?

"La Palestine n’est pas un pays, c’est une zone géographique, au maximum une région. Comme l’Aquitaine, la Crimée, le Cotentin, la presqu’île de Crozon.

Il n’y a pas plus de peuple palestinien. Un peuple a une histoire, une identité, une spécificité linguistique, politique, etc " 

Xavier Gorce, X, 10 juillet 2025


"Il n'y a pas... de peuple palestinien." Affirmation catégorique et sans nuance. Les Palestiniens ne sont pas un peuple, ils n'ont pas d'histoire et pas d'identité. Circulez, y'a rien à voir.

La notion de peuple n'est ni évidente, ni définitive. On pourrait en discuter à l'infini. Qu'est-ce qui fait un peuple ? Est-ce le pays qui fait le peuple ou l'inverse ? Les Belges sont-ils un peuple, ou un ramassis de francophones et de néerlandophones qui n'ont rien à faire ensemble ? Les Autrichiens au dix-neuvième siècle étaeint-ils un peuple distinct des Allemands, ou juste une partie d'un peuple plus vaste ? (Malheureusement, Gorce n'était pas là pour en décider, ça nous aurait évité plusieurs guerres.) Les Rwandais, les Maliens sont-ils un peuple ? Plus concrètement, ont-ils le droit d'avoir une carte d'identité rwandaise ou malienne ? (J'ai hâte que Gorce légifère, le suspense est insoutenable !) À quel moment précis dans l'histoire les Américains (USA) sont-ils devenus un peuple ? Quid des Algériens ? Quid des Israéliens ? Les juifs de Pologne, du Maroc ou d'Irak constituaient-ils factuellement un peuple d'Israel pré-existant, au sens où on l'entend aujourd'hui, ou cette identité a-t-elle été sinon construite, du moins consolidée et remodelée dans le cadre du projet sioniste ? Je pense encore aux gens qui nous expliquaient doctement que les Ukrainiens ne sont que des Russes fascistes, et l'Ukraine un territoire à dépecer. En parlant de peuple, d'ailleurs, Gorce n'a jamais entendu parler des Tatars de Crimée, conquis au XVIIIe siècle, déportés par Staline, aujourd'hui minoritaires et maltraités par la Russie ?

Et au fait, qu'en pensent les premiers intéressés ? Est-ce à un Français confortablement installé dans une vieille nation établie, de décreter que les Palestiniens sont ou ne sont pas un peuple ?

Les Palestiniens représentent a minima une communauté de destin : naguère aux premières loges du projet sioniste naissant, ils sont aujourd'hui ces Arabes sans État dont aucun État ne veut, ni Israël, ni les États arabes voisins. Peuple ou pas peuple, la question palestinienne reste à résoudre et ne peut pas simplement pourrir indéfiniment. Faute d'État (ou d'États), les Palestiniens sont aujourd'hui des non-citoyens dans un entre-deux intenable. Ils devront bien un jour être citoyens à part entière d'un État (ou d'États) à part entière, réellement souverains. Ils ne peuvent pas rester éternellement l'objet d'un jeu de ping-pong entre États, comme une patate chaude qu'on se refile. Gorce joue évidemment au ping-pong, il renvoie la balle sur le terrain arabe. Quand il s'agit de prendre la terre des Palestiniens, les preneurs ne manquent pas. Par contre, pour ce qui est des populations, non merci, on n'en veut pas, ils sont à vous... Mais des millions de Palestiniens ne vont pas magiquement disparaitre, et ce, quels que soient les efforts du gouvernement israélien pour leur trouver un nouveau domicile en Somalie ou je ne sais où.

J'ajoute qu'attribuer une citoyenneté à une population n'est pas une récompense, un bon point distribué par la maîtresse. L'histoire même du projet sioniste nous apprend cela, entre autres.